L’aéro-club de Sidi-Bel-Abbès, un fleuron de la ville dans un état de ruine : l’interview exclusive de son président.
Bâti en 1931 sur une superficie de 94 hectares, l’aéroclub de Sidi-Bel-Abbés fut le premier à voir le jour dans toute l’Europe et l’Afrique, un fleuron par excellence de la ville de petit Paris, beaucoup de noms célèbres sont passés et atterris sur ses pistes et nombreux sont ces pilotes chevronnés qui ont fait le bonheur de nombreuses compagnies aériennes de part le monde sont sortis de cette école d’apprentissage de l’art de voler, car en plus d’être une discipline et un métier le pilotage d’avion est aussi un art et un savoir-faire qui n’est pas donné à tout le monde.
Aujourd’hui seuls les bons souvenirs d’une époque révolue font adoucir le gout amer d’une situation chaotique dans laquelle survie ce qui reste de cet ex dinosaure en aéronautique, les pistes sont dans un état de délabrement très avancé, celle plus petite est complètement défoncée et labourée, les aérogares sont dans un état de ruine avéré, l’assiette foncière dépiécée d’une dizaine d’hectares, la tour de contrôle phagocytée par l’unité de l’armée de terre, le périmètre n’est plus sécurisé par une clôture, pis encore des constructions illicites servant de ferme agricole se sont implantées au bas de la grande piste d’atterrissage, d’autres en cours de construction avec l’aval de la DUC dans l’axe de la piste communément connu de trouée d’envol, de quoi faire dire à son président Monsieur Sahraoui Habib, ex pilote de ligne en retraite, que les choses sont arrivées à un stade qui ne peut être qualifié que de chaotique.
Le mercredi 27 février, vers 18h, nous avons décidé d’aller enquêter sur place, pour voir de visu l’état des lieux, prendre des photos et recueillir un maximum d’information qui nous servira de matière à écrire un article journalistique, au moment où des voix s’élèvent (y compris sur Facebook) pour dénoncer une léthargie qui a que trop duré, or à notre grande surprise on a rencontré le président de l’aéroclub en la personne de Monsieur Sahraoui Habib qui accompagné de son « co-équipier » a eu l’amabilité de nous recevoir dans son bureau au fond du foyer récemment rénové, en présence des représentants de la société civile pour répondre à nos questions (et que nous vous proposons sous forme d’une vidéo) sur les différents aspects qui entourent ce sujet là et qui est devenu par la force des choses « l’affaire aéroclub ».
Convié à nous donner des éclaircissements sur cette situation, notre interlocuteur dira que les portes de l’aviation commencent dans les aéroclubs, c’est dire que les meilleurs pilotes au niveau d’air Algérie c’est des gens qui sont sortis des aéroclubs, et ils sont nombreux a faire aussi le bonheur d’autres compagnies de par le monde.
Il continuera dans sa lancée pour dire : « le site était dans un état d’bondon total, notre orgueil ne nous a pas permis d’accepter cet état de ruine ce qui nous a permis de prendre la décision de tenir le taureau par les cornes, et ouvrer avec droiture et obsession afin de redonner espoir aux riverains de la Mékkera et aux familles Belabbesiennes pour retrouver le chemin de leur espace fétiche sain et sécurisé qu’est l’aérodrome et son club qui a connu la gloire par un passé pas très lointain ».
Il ajoutera « que l’aviation est dans le club, et que ce club de Sidi-Bel-Abbés est très bien connu depuis 1931, date où les colons avaient déjà 12 avions tous civils, mais on tient à ce que ca soit une école pour former les jeunes qui au lieu d’errer oisivement dans la rue, ils pourront accéder à cet espace et avoir une formation des plus prometteuse. On peut dispenser des stages de packomoteur (un parachute avec moteur) on a déjà des étudiants de l’université Djillali liabes, on a dispensé également une formation pour des jeunes en para-moteur, parapente et l’aerodillisme, et malgré l’absence d’avions, ils ont pu confectionner leur modèle de petits avions et on a des génies dans ce domaine là».
Questionné sur les moyens financiers disponibles pour faire tourner ce début timide, Monsieur Sahraoui dira en substance : «le fonctionnement de ce site et le financement de la rénovation du foyer ont été possibles grâce aux petites subventions de l’APC, aujourd’hui nous avons des gens que nous connaissons au ministère du transport, à la direction de la gestion des aéroports, le PAPC et le wali sont également disposés à nous aider et à nous accompagner pour relancer l’aéroclub et voir les belabbesiens voler dans leur ciel comme jadis ».
A la question de savoir pourquoi la situation de l’aéroclub est arrivée là?, il nous expliqua qu’un accident d’avion survenu en 1994, avait causé la mort du président du club de l’époque et d’un instructeur ce qui a donné un coup de frein mortel à ce qui était déjà moribond ….auquel il faut ajouter les effets de la décennie noire et beaucoup d’autres facteurs exogènes aussi. Mais il ne faut pas oublier les heures de gloire de notre aéroclub, c’est ainsi qu’en 1975, nous avons pu former une promotion d’enfants pauvres et démunis issus de milieu rural pour la plupart des enfants d’agriculteurs (fellah), parmi ces fils de fellah il y en a qui ont volé durant toute leur carrière dans de grands avions à air Algérie, c’était un défi que l’aéroclub a relevé avec fierté et d’une manière majestueuse.
Cependant Monsieur Sahraoui Habib a tenu à dénoncer fermement les constructions autorisées par la DUC sans prendre en compte l’existence d’un aérodrome à proximité et qui se font dans l’axe de la piste communément connu chez les aviateurs de trouée d’envol, des deux cotés de la station d’essence de souasse, mais le comble dans cette blague de mauvais gout est que le jour où on aura acquis l’autorisation de faire voler des avions, les autorités locales seront dans l’obligation de tout faire démolir.
Pour bien finir notre interview, Monsieur Sahraoui dira « maintenant qu’à la tète du ministère du transport il y a un enfant de la ville de Sidi-Bel-Abbès, en la personne du Ministre Tou Amar, il serait plus judicieux que la société civile se mobilise d’avantage et pourquoi pas lancer une pétition pour faire renaitre l’aéroclub de ses cendres comme un phœnix, car si notre aéroclub démarre ceci va impulser une nouvelle dynamique à l’échelle nationale.
Fouad. H