mar. Jan 9th, 2024

Mettons nous d’accord sur ce que c’est le plan de Constantine

Le plan de Constantine, c’est tout d’abord  le discours du général De gaule  du 03 octobre 1958 à Constantine pour le lancement  de son plan de   développement économique et social pour l’Algérie.

A l’occasion de sa deuxième visite en Algérie après son retour au pouvoir, le général de Gaulle annonce à Constantine, capitale de l’Est algérien, le lancement de son plan de développement économique et social pour l’Algérie. Ce plan vise à réduire, en cinq ans, les inégalités entre musulmans et Européens sur le territoire algérien.

 

Quelques  passages du discours :

Algériennes, Algériens, Je suis venu ici pour vous l’annoncer : C’est la transformation profonde de ce pays si courageux, si vivant, mais aussi si difficile et souffrant qu’il faut réaliser. Cela veut dire qu’il est nécessaire que les conditions de vie de chacune et de chacun s’améliorent de jour en jour. Cela veut dire que le travail des habitants, les ressources du sol, la valeur des élites, doivent être mis au jour et développés. Cela veut dire que les enfants doivent être instruits. Cela veut dire que l’Algérie toute entière doit avoir sa part de ce que la civilisation moderne peut et doit apporter aux hommes en fait de bien-être et de dignité. Mais, les plus grands projets ne valent qu’en fonction des mesures pratiques qui sont prises pour les réaliser. Voici les mesures que mon gouvernement va incessamment prescrire pour les cinq années qui viennent, en vertu des pleins pouvoirs qui viennent par la Constitution nouvelle de m’être tout justement conférés. Cette évolution profonde, à quoi peut-elle conduire quant au statut politique de l’Algérie ?…….. Dans deux mois, l’Algérie élira ses représentants dans les mêmes conditions que le fera la métropole. Mais, il faudra qu’au moins les deux tiers de ses représentants soient des citoyens musulmans. Autre chose se rapporte à l’avenir. L’avenir de l’Algérie, de toute façon, parce que c’est la nature des choses, sera bâti sur une double base, sa personnalité et sa solidarité étroite avec la métropole française……..Devant la race des hommes aujourd’hui, il n’y a que deux routes : la guerre ou la fraternité. En Algérie comme partout, la France, pour sa part, a choisi la Fraternité. Vive la République, vive l’Algérie et la France !

Au lendemain du référendum constitutionnel par lequel 80% des Français (et 97% des votants en Algérie et au Sahara) ont approuvé les nouvelles institutions et témoigné leur confiance au général, celui-ci se rend pour la troisième fois en Algérie depuis son retour au pouvoir. Son discours se veut un constat de la preuve d’attachement  » pour toujours » que l’Algérie vient ainsi de donner à la France. En contrepartie, de Gaulle détaille dans ce que l’histoire a retenu sous le nom de « Plan de Constantine » les mesures économiques et sociales annoncées à Alger le 3 juillet. Soulignant le progrès considérable que cette politique va faire accomplir à l’Algérie, il lance un appel aux combattants du FLN afin qu’ils déposent les armes et participent à l’effort commun et aux Etats arabes qui les soutiennent afin qu’ils cessent d’envenimer la situation.

Et voici un témoignage vivant du fils de l’entrepreneur  Salas.

Arriva le 13 Mai 1958 et l’époque des promesses d’une Algérie Française, fraternelle et prospère. Promesses faites par Charles De Gaulle, que nous avions aidé à mettre en place, pour nous inciter par son porte-voix dans le cadre du fameux plan de Constantine à investir à outrance en Algérie car elle resterait “Française de Dunkerque à Tamanrasset jusqu’à la fin des temps” Nous n’avions aucune raison de douter de sa parole et de son “je vous ai compris “ sur la place du Forum d’ Alger et…. nous avions tellement envie de croire en ses déclarations qui nous paraissait sincères , avec ces trémolos dans la voix. Trémolos qui n’étaient en fait que les signes précurseurs de sa haine envers ces Pieds-Noirs qui avaient eu l’audace de mettre en doute son action en 1941. Pauvres naïfs que nous étions de prendre pour parole d’évangile ses discours aussi démagogiques et fallacieux que ceux d’un camelot marchand d’élixirs à l’époque du Far-West. Mais eux, on pouvait les lyncher.
Quelle escroquerie ! Et comment avons nous pu être crédules et naïfs à ce point ?
On aurait dû se rappeler que parfois avec nos prétendus défenseurs ou amis, nous n’avons surtout pas besoin d’ennemis.

Certains, à la désapprobation générale mais comme on le verra par la suite à juste titre, peu convaincus des promesses gouvernementales s’empressèrent de mettre leurs avoirs en lieu sûr, et d’autres (la grande majorité) comme mon père, avec l’aide de l’état et l’appui de ses banques investit son argent gagné dangereusement (à la roulette de la vie) ,en l’achat de terrains et en la construction d’immeubles en copropriété tels le Trianon, le Lido, le Paris (Gros-œuvre achevé à 100% lors de notre repli en France)car en vertu de ce fameux plan de Constantine, la population européenne et algérienne avait repris confiance et l’essor factice fût spectaculaire, on ne trouvait plus un seul logement à acheter.

On se lança à corps perdu en la construction d’immeubles en copropriété tels le Bel Horizon, le Lido, Le Trianon, le Paris(plusieurs dizaines de logements de standing) et nous construisîmes même la célèbre “Maison de retraite des Anciens légionnaires”, au sein de la cité Bellat et inaugurée d’ailleurs par ce dernier, laquelle était un magnifique monument dû aux talents conjugués de M Mrs Benkemoun, architecte ,et Keller, Ingénieur de structures béton, lesquels étaient mes anciens Maîtres, qui comme je l’ai déjà dit, m’avaient transmis un peu de leur savoir-faire.
Après mon mariage et pendant que la guerre d’Algérie battait son plein, je devais reprendre des études de technicien du bâtiment auprès de la Fédération du Bâtiment et des Travaux Publics. Ces cours avaient lieu à Oran, le samedi toute la journée et ce là, malgré l’insécurité qui régnait sur les routes, nous accomplissions le trajet dans les deux sens pour suivre nos cours et le soir venu, nous emportions du travail à faire chez soi, pour toute la semaine.
Immeubles “Bel Horizon” et “Lido”
Construits par notre entreprise dans le cadre du plan de Constantine.
Mon objectif était d’acquérir une formation complète de Technicien du bâtiment et des TP. J’étais hyper motivé car je prévoyais que cette qualification me serait nécessaire pour m’ouvrir certaines portes dans un avenir proche que j’appréhendais un peu tout en le pressentant , ignorant encore de ce qui allait se passer.
Au terme de trois années d’études assez poussées, j’obtenais un diplôme de « Commis d’entreprise  » lequel comme je devais m’en rendre compte quelques années plus tard, s’avéra pour moi d’une importance capitale.

Avant la guerre de libération les besoins annuels de l’Algérie en matière de

Logements nouveaux étaient estimés à 80 000 unités. Or, le rythme de constructions ne pouvait jamais atteindre ce nombre, si l’on considère les réalisations durant les trois  années suivantes :

– 1954 : 12 000 logements ;

– 1955 : 13 000 logements ;

– 1958 : 18 000 logements.

Parmi les promesses faites par le Général De Gaulle dans son discours du 30 octobre 1958 à Constantine, à travers lequel il a dévoilé les grandes lignes du plan quinquennal ou appelé communément “Plan de Constantine ”, figure celle de la réalisation de 200 000 logements destinés à loger 1 000 000 de personnes. Ce qui veut dire qu’il est nécessaire de livrer chaque année 40 000 logements et ce durant tout le plan quinquennal. Or, les maisons de 2 000 000 de personnes déplacées à la suite de bombardements et de ratissages ont été systématiquement détruites par l’armée française, si bien que le nombre prévu par le plan suscité était tout à fait dérisoire et bien en deçà des besoins réels du fait qu’il ne pouvait guère remplacer les logements détruits auxquels il aurait fallu ajouter les habitats précaires, les bidonvilles, etc.

NB : les immeubles, sidi yacine, Kaid rabah, toba, leurs études ont été ficelées en 1955, les travaux lancés la même année, et occupés par leurs bénéficiaires en 1957.

 

Mohamed Boudjakdji.